CRÉATION D’UNE FORÊT MODÈLE

Chapitre 1 de la Trousse des Forêts Modèles

Créer une Forêt Modèle signifie 1) définir une zone physique où il est possible de gérer conjointement les ressources et le développement durable, 2) réunir tous les intervenants pour prendre ces décisions de manière participative, équitable et transparente, 3) élaborer et mettre en œuvre un plan stratégique, et 4) franchir les étapes pour devenir membre du RIFM.

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Approche de la Forêt Modèle

Il n’y a pas deux Forêts Modèles identiques. Bien qu’elles partagent toutes des principes et des attributs communs, les circonstances culturelles, géographiques, institutionnelles, politiques et autres rendent chaque Forêt Modèle unique. Les activités et les approches entreprises par les Forêts Modèles diffèrent selon cette diversité. Dans certaines Forêts Modèles, par exemple, les questions de conservation sont primordiales, tandis que dans d’autres, la diversification économique, la gestion des conflits, les chaînes de valeur du bois, la gestion des bassins hydrographiques ou d’autres questions sont plus importantes.

Il est important que la Forêt Modèle élabore une approche et un programme de travail pertinents, inclusifs, techniquement viables et réalisables, qui reflètent les priorités, les circonstances et les coutumes des intervenants. Pour ce faire, il faut suivre les six Principes des Forêts Modèles décrits ci-dessous.


Principes des Forêts Modèles

De nombreuses stratégies de gestion des terres et des ressources reflètent déjà les éléments fondamentaux du concept de Forêt Modèle, par exemple, la foresterie participative, la restauration des paysages forestiers, la gestion écosystémique, les réseaux de collaboration et les approches axées sur le paysage. Ces éléments se retrouvent dans les six Principes des Forêts Modèles, qui aident à établir et à maintenir une Forêt Modèle :

  1. Paysage
  2. Partenariat
  3. Engagement envers la durabilité
  4. Gouvernance
  5. Programme d’activités
  6. Partage des connaissances, renforcement des capacités et réseautage

Quels que soient les écosystèmes ou les tenures spécifiques de la forêt modèle, les six Principes ont les effets suivants :

  • Faciliter les expériences en matière de développement durable.
  • Maintenir une grande cohérence des programmes.
  • Établir un lien clair entre les applications à l’échelle du paysage et les enjeux stratégiques nationaux et internationaux.
  • Aider chaque Forêt Modèle à maintenir son orientation conceptuelle et l’intégrité du programme tout au long de son développement.
  • Veiller à ce que chaque Forêt Modèle ait l’autonomie nécessaire pour concevoir une initiative qui reflète les priorités locales.
  • Créer un mécanisme pour réunir un large éventail d’intervenants et jeter les bases du réseautage aux échelles locale, nationale, régionale et internationale.

La façon d’appliquer les Principes pour créer une Forêt Modèle est décrite plus en détail ci-dessous.


Définir le paysage

Il n’y a pas de superficie minimale ou maximale prescrite pour une Forêt Modèle. Pour certaines, les limites correspondent à une unité administrative existante ou à plusieurs unités administratives. D’autres sont définies par une limite écologique, comme un bassin hydrographique ou plusieurs bassins versants. Autrement, les limites peuvent être déterminées par un enjeu particulier que les intervenants souhaitent aborder, comme les espèces en péril, ou la restauration du paysage par exemple. L’élément clé consiste à assurer une diversité d’intérêts, d’utilisations des terres et de représentation des intervenants dans la région choisie.

En d’autres termes, une forêt modèle doit être assez grande pour représenter toute la gamme des utilisations et des valeurs du paysage dans la région environnante. Avec ses 20 750 hectares, la Forêt Modèle Carood Watershed Philippines est l’une des plus petites, tandis que la Forêt Modèle Chiquitano en Bolivie couvre 20 millions d’hectares. La plupart des forêts modèles s’étendent sur 300 000 à 500 000 hectares. Un site peut d’abord se développer sur une petite superficie, et prendre de l’expansion avec le temps à mesure que de nouveaux enjeux ou de nouvelles priorités surgissent (bien qu’il ne soit pas nécessaire d’accroître la superficie).


Identifier les intervenants des Forêts Modèles

Une fois que les enjeux que l’on désire aborder ont été déterminés dans un contexte particulier, la prochaine étape consiste à identifier les intervenants qui doivent être mobilisés. Les intervenants de la Forêt Modèle sont des personnes, des groupes ou des institutions qui s’intéressent à une Forêt Modèle, qui sont touchés par elle ou qui peuvent influer (positivement ou négativement) sur les décisions relatives aux priorités en matière de gestion des ressources et de programmation. Il n’est pas nécessaire que les intervenants résident à l’intérieur des limites physiques de la forêt modèle. En fait, de nombreuses forêts modèles font appel à des organisations de l’extérieur, comme des universités et des établissements de recherche. De plus, bien que certains intervenants demeurent mobilisés tout au long de la vie d’une Forêt Modèle, d’autres changent avec le temps à mesure que les enjeux, les programmes et les besoins évoluent.

Les intervenants qui collaborent volontairement pour définir une vision commune et aborder des questions d’intérêt mutuel, et qui sont officiellement reconnus dans la structure de gouvernance de la Forêt Modèle, sont appelés les « partenaires ».

Le premier groupe d’intervenants peut être petit, mais il augmentera probablement avec le temps. Les partenaires devraient encourager les nouveaux intervenants à participer, à mesure que des lacunes sont relevées dans les connaissances, les enjeux ou la représentation. D’autres organisations pourraient souhaiter participer lorsqu’elles en apprendront davantage sur les forêts modèles et leurs activités.

Un partenariat de forêt modèle n’a pas de pouvoir légal sur l’assise territoriale et, par conséquent, il doit inclure les principaux utilisateurs des terres, les gestionnaires et les autres intervenants. Voici quelques exemples d’intervenants :

  • Industrie
  • Groupes communautaires
  • Peuples autochtones
  • Organismes gouvernementaux
  • Organismes non gouvernementaux
  • Établissements universitaires et de recherche
  • Parcs nationaux
  • Propriétaires fonciers privés

Voici quelques facteurs à prendre en considération au moment d’identifier les intervenants :

  • Influence : L’influence va au-delà du pouvoir qu’un intervenant exerce pour apporter des changements. Il peut aussi être question d’absence d’influence. Il faut tenir compte des besoins et des intérêts des personnes qui peuvent être touchées par les décisions, mais qui n’ont pas le pouvoir de les influencer.
  • Responsabilité : Examiner les responsabilités d’un intervenant potentiel. Il peut s’agir de la responsabilité réglementaire en matière de conformité aux lois, aux politiques et aux règlements; la responsabilité contractuelle ou juridique envers d’autres organisations; la responsabilité financière envers des donateurs ou d’autres personnes qui fournissent des ressources; et la responsabilité éthique ou morale envers les entités qui sont touchées ou qui peuvent avoir une influence sur la prise de décisions visant la forêt modèle.
  • Représentation : Tenir compte non seulement des différentes valeurs et utilisations du paysage que la Forêt Modèle devrait représenter, mais aussi de la légitimité d’un représentant et du nombre d’intérêts représentés. Les parties prenantes qu’un intervenant prétend représenter doivent reconnaître et approuver cette personne en tant que leur représentant.

Souvent, les Forêts Modèles sont créées pour répondre à des intérêts conflictuels, ce qui les rend complexes en pratique. Par conséquent, le partenariat comprend souvent des intervenants qui ne travaillent généralement pas ensemble ou qui ne sont pas d’accord les uns avec les autres. Pour mobiliser la participation et l’expertise locales, le partenariat doit reconnaître que ses nombreux points de vue ont des éléments communs et une place dans le processus décisionnel.

Il est fortement recommandé de mener des exercices de planification sous forme d’ateliers et de réunions pour aider les intervenants à parvenir à un consensus sur les orientations stratégiques de la Forêt Modèle, y compris sa vision, ses objectifs et ses impacts prévus, et les activités en cours. Ces éléments devraient constituer les fondements du plan stratégique, qui vise à appliquer et à démontrer des pratiques de gestion des ressources naturelles respectueuses de l’environnement, socialement acceptables et économiquement viables. Il est utile de commencer par cerner les points communs plutôt que de se concentrer sur les différences. Différentes approches peuvent être nécessaires pour les différents intervenants afin d’assurer leur pleine participation.

De plus amples renseignements sur la planification stratégique sont disponibles au chapitre 2 du présent guide.


Évaluer la Forêt Modèle

Ces questions clés vous aideront à évaluer les plans et approches des forêts modèles par rapport aux six Principes des forêts modèles pendant la période de développement :

ÉVALUER LE PAYSAGE 

  • Votre paysage renferme-t-il des ressources forestières et autres ressources naturelles importantes, y compris des caractéristiques environnementales uniques?
  • Votre zone tient-elle compte des considérations sociales, culturelles et autres?
  • Y a-t-il un éventail d’enjeux et de valeurs représentés dans le paysage?
  • Existe-t-il une diversité de types de paysages (écosystèmes, utilisations des terres, etc.) dans votre région?
  • Votre zone est-elle représentative de votre région géographique élargie?
  • Y a-t-il une justification claire pour la zone sélectionnée?

ÉVALUATION DU PARTENARIAT 

  • La plus grande partie de la population peut-elle accéder à la Forêt Modèle par l’entremise d’un intervenant qui représente sa principale activité, sa principale valeur ou sa principale zone d’intérêt?
  • La Forêt Modèle a-t-elle un partenariat diversifié d’intervenants qui identifient des buts, des priorités et des objectifs de développement et qui établissent des lignes directrices stratégiques pour l’ensemble du programme?
  • Y a-t-il des valeurs ou des utilisations des ressources sous-représentées ou non représentées dans votre partenariat?
  • Y a-t-il des intervenants ou d’autres groupes qui ne participent pas actuellement et qui pourraient vous aider à atteindre vos objectifs?

ÉVALUER L’ENGAGEMENT ENVERS LA DURABILITÉ 

  • Votre partenariat a-t-il une stratégie convenue pour déterminer les progrès vers la durabilité? S’engage-t-on à élaborer et à mettre en œuvre cette stratégie?
  • Votre partenariat comporte-t-il un engagement à long terme à l’égard du concept de développement durable? Appuiera-t-il la recherche et le transfert de technologie à ce sujet?
  • La Forêt Modèle a-t-elle l’appui des autorités nationales, régionales et locales (publiques ou privées) ayant compétence sur les terres et les ressources?
  • Le programme de la forêt modèle est-il lié à un plan forestier national ou régional global?

ÉVALUATION DE LA GOUVERNANCE 

  • Votre structure de gouvernance encourage-t-elle, en pratique, une participation significative des intervenants?
  • La Forêt Modèle est-elle gérée par un partenariat d’intervenants représentant divers intérêts (p. ex., l’industrie, des groupes communautaires, des organismes gouvernementaux, des groupes environnementaux et forestiers non gouvernementaux, des établissements d’enseignement et universitaires, des parcs nationaux, des groupes autochtones, des propriétaires fonciers privés)?
  • La Forêt Modèle est-elle gérée par consensus et la structure décisionnelle est-elle transparente?
  • Votre Forêt Modèle a-t-elle établi des comités techniques ou consultatifs pour élaborer votre programme et en faire rapport au comité des intervenants?
  • Votre structure de gouvernance exclut-elle ou empêche-t-elle la participation de certains groupes?

ÉVALUATION DU PROGRAMME D’ACTIVITÉS

  • La Forêt Modèle reflète-t-elle la majorité des valeurs forestières locales et nationales définies dans un programme forestier national ou une documentation semblable?
  • La Forêt Modèle tient-elle compte des besoins des populations locales et autochtones, ainsi que de la conservation et de l’utilisation judicieuse des forêts et des ressources naturelles?
  • Dans le cadre de votre programme, la Forêt Modèle considère-t-elle que l’éventail des valeurs forestières identifiées est important? Tient-elle compte des dimensions sociales, économiques, écologiques et historiques de la gestion durable du paysage forestier et des ressources naturelles?
  • La Forêt Modèle fait-elle preuve des pratiques et techniques de gestion les plus appropriées sur le plan environnemental et appuie-t-elle, dans la mesure du possible, la recherche scientifique et l’application de nouvelles technologies?
  • La Forêt Modèle fait-elle de l’éducation et de la formation dans la région pour sensibiliser davantage les collectivités locales au programme?

ÉVALUER LE PARTAGE DES CONNAISSANCES, LE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS ET LE RÉSEAUTAGE 

  • Faites-vous connaître votre engagement envers le partage des connaissances par des activités de réseautage, des projets de démonstration, des liens avec d’autres forêts modèles et la participation à des processus mondiaux (p. ex., l’élaboration et l’application d’indicateurs locaux de gestion durable des forêts)?
  • La Forêt Modèle sera-t-elle un partenaire actif du RIFM et partagera-t-elle ses expériences, ses réussites et ses échecs avec d’autres forêts modèles?

SUIVANT : Chapitre 2 : Planification stratégique des Forêts Modèles

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